Les patients qui se tournent vers la phytothérapie, que ce soit sous forme de plantes brutes ou de compléments alimentaires, trouvent souvent peu de conseils adaptés de la part des professionnels de santé non spécialisés. Les bases de données officielles sont également rares. En Europe, les principales références sont les monographies de l’Agence européenne du médicament (EMA) et le site payant de l’ESCOP (European Scientific Cooperative on Phytotherapy). En France, ces informations sont synthétisées dans les fiches Phytothérapie VIDAL pour 64 plantes médicinales.
En avril 2023, l’Agence nationale de sécurité de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) a publié une base de données francophone concernant 118 plantes, en se basant sur les données accessibles via l’EMA. Cette nécessité d’informations fiables sur les plantes médicinales découle de la prolifération des compléments alimentaires sur le marché depuis une vingtaine d’années. Certains de ces compléments contiennent des plantes médicinales qui peuvent présenter des risques pour la santé, notamment en raison de leur toxicité intrinsèque et de possibles interactions avec des médicaments, des contre-indications physiopathologiques ou des précautions spécifiques pour certains groupes à risque tels que les enfants, les femmes enceintes et allaitantes.
Contrairement aux médicaments, les compléments alimentaires ne sont pas soumis à une notice obligatoire fournissant des informations détaillées sur leur sécurité d’utilisation. Les étiquetages ne mentionnent que quelques informations essentielles concernant les ingrédients. De plus, les consommateurs reçoivent rarement des conseils personnalisés, ce qui peut les amener à utiliser des produits inadaptés à leur état de santé.
Pour pallier ce manque d’informations, les monographies de l’EMA jouent un rôle essentiel. Le Comité des médicaments à base de plantes de l’EMA rassemble et évalue les données scientifiques concernant les substances, préparations et associations à base de plantes, en mettant l’accent sur la sécurité et l’efficacité. Ces monographies sont des avis scientifiques qui fournissent des informations sur l’utilisation des produits à base de plantes, leur groupe cible, leur sécurité, notamment en ce qui concerne les effets indésirables et les interactions médicamenteuses. Elles contribuent à l’harmonisation du marché européen et permettent aux autorités sanitaires nationales d’évaluer les demandes de mise sur le marché pour les produits de phytothérapie souhaitant avoir le statut de médicament.
En France, l’Anses a analysé et adapté les restrictions existantes pour les médicaments à base de plantes, en se basant sur les monographies de l’EMA, pour les transposer aux compléments alimentaires contenant les mêmes plantes. Cette analyse a été publiée sous forme d’avis accompagné d’une annexe listant les précautions d’emploi, les recommandations, les contre-indications et les interactions médicamenteuses potentielles pour 118 plantes médicinales utilisées dans les compléments alimentaires. L’Anses a également créé un tableau synthétique en ligne destiné principalement aux médecins, pharmaciens et nutritionnistes pour les aider à mieux conseiller les consommateurs de compléments alimentaires.L’avis de l’Anses met en évidence les risques liés à la consommation de compléments alimentaires à base de plantes, qui peuvent entraîner des effets indésirables graves tels que des allergies sévères ou des atteintes hépatiques potentiellement mortelles. Pour améliorer la sécurité des consommateurs, l’Anses recommande aux fabricants de mentionner de manière explicite les restrictions d’usage liées à la présence de plantes sur l’emballage ou la notice. Elle encourage également les professionnels de santé à se former sur la sécurité et l’utilisation des plantes contenues dans ces produits, et à demander systématiquement aux patients s’ils consomment des compléments alimentaires avant de prescrire ou de délivrer un médicament. Enfin, déclarer les effets indésirables permet d’améliorer la connaissance des produits et la sécurité des consommateurs.